only one will stand at the end of it all. — idyia&alekto

Sans un mot, elle regarde Hyperion descendre du navire et disparaître dans les rues de l’ancienne cité dévastée. Dans son dos, les hommes marmonnent des propos incohérents et inaudibles, se questionnant ouvertement sur la décision de leur capitaine. Et Idyia n’est pas loin d’unir sa voix aux leurs. Malgré leur discussion – leur dispute – Hyperion était devenu comme un étranger pour elle. Obstiné, sourd à ses arguments, il avait choisi, contre tout bon sens, de se rendre à Knossos. Et en tant que second, elle n’avait eu d’autre option que de se plier à cette résolution. Mais elle, Idyia, s’insurgeait quotidiennement contre le capitaine. Silencieusement ou à grands cris, dans l’intimité de sa cabine, elle avait tenté de convaincre Hyperion de renoncer à son projet. En vain. Accoudée au bastingage, la messarienne soupire en observant les ruines de la ville. Elle a tant aimé, et tant souffert, ici… Elle ne reconnaît plus rien, mais les souvenirs l’assaillent. Dix ans après sa fuite, elle se demande encore si les membres de sa famille ont survécu. Probablement, oui… mais elle ignore où ils se trouvent.

Se retournant, elle fixe l’attroupement des hommes, occupés à débattre entre eux. Cette fois, elle n’a pas la force de se mêler à la conversation. Quittant son poste d’observation, elle agrippe l’épaule d’un jeune matelot pour attirer son attention. – Je serais dans ma cabine si vous avez besoin de moi. Le garçon hoche la tête et elle le relâche, prenant la direction du château arrière. La porte refermée derrière elle, Idyia se laisse tomber sur une chaise et attrape machinalement une carte. Mais son esprit vagabonde, s’interrogeant sur l’entretien d’Hyperion et de l’impératrice. Si celui-ci a seulement lieu, car elle ne serait pas surprise d’apprendre l’arrestation pure et simple du capitaine. Il reste, comme eux tous, un criminel. La naissance toute récente du nouvel empire ne l’exempt pas des lois mortelles et ici, comme partout ailleurs, ils n’ont pas droit de cité.

Trois coups frappés à sa porte la sortent de ses pensées et après son accord, le matelot passe la tête par l’entrebâillement. – Quelqu’un demande à te voir, Idyia. Une envoyée de l’impératrice. Sourcils froncés, la seconde hoche la tête et quitte son fauteuil pour suivre le garçon. Sur le pont, elle constate que les hommes ne se sont pas dispersés, au contraire. Mais ils s’écartent sur son passage, la laissant rejoindre les curieux appuyés contre le bastingage et penchés vers la terre ferme. Intriguée, Idyia les imite et se fige en reconnaissant la chevelure noire d’Alekto. Elle ne l’a vue qu’une fois, mais son visage s’est gravé dans sa mémoire. Aussitôt, la messarienne sent un courant électrique la parcourir, réaction épidermique à la présence de l’objet de leur visite à Knossos. Ses doigts se crispent sur le bois du garde-corps mais elle ne laisse rien paraître de sa colère. – Laissez-la monter, crie-t-elle aux gardes impériaux sensés les retenir à terre. Comme si elle allait partir en abandonnant Hyperion. Dents serrées, elle observe Alekto alors que celle-ci grimpe à bord du navire. Lorsqu’elle pose le pied sur le pont, Idyia ne s’approche pas, restant à une sage distance de la jeune femme. – Je suis le second, Idyia. Que pouvons-nous, humbles mortels, pour Sa Majesté ? Le ton mesquin adopté par la seconde fait ricaner quelques marins mais Idyia reste impassible, fixant Alekto avec sévérité.