can't part the sea, can't reach the shore — despina leventis

Sa main se pose sur le faucon à son épaule, et ses doigts viennent caresser le plumage. D’un mouvement de la main, elle l’invite à s’envoler. Il pousse un cri, comme un « à plus tard » qu’elle reconnait si bien. Elle sait que, le faucon reviendra. Ses pieds quittent le navire et viennent se poser sur le ponton de la cité de Koressia. Elle observe les navires alentours, en quête du Kraken. En vain. Le bâtiment pirate n’était pas encore arrivé ici, et elle était en avance. Elle pose les yeux sur Eirini, l’insoumise cavalerie, désormais sœur amazone. « J’ai besoin d’aller prendre l’air, je vous rejoins d’ici une à deux heures, à la taverne. » Elles devraient repartir ensuite, en pleine mission d’exploration pour les amazones. Silia leur reine, leur avait confié une mission de la plus haute importance, et elles se devaient de la mener à bien. Mais elle devait d’abord les retrouver eux, les insoumis.

Elle observe l’amoncèlement des épaves ci et là, qui forment boutiques et habitations. Navires fantômes qui autrefois voguaient sur les flots des mers et océan, mais qui aujourd’hui, ne peuvent siéger qu’ici. Elle a l’impression de marcher dans un cimetière Megara. La taverne où elle avait rendez-vous n’était pas loin, et bientôt, son  regard pourrait à nouveau croiser celui de sa plus ancienne alliée. L’allée des embrumes n’était pas un endroit où il était bon de se déplacer, et mêmes les plus grands criminels d’Ellada, savaient qu’ils devaient rester sur leurs gardes dans cette allée exiguë, où chaque ombre semblait vouloir vous dévorer. Mais Megara n’avait pas peur, ou en tout cas, ne le montrait pas. Elle avait selon elle, affronté bien pire que des hommes et mécréants. Elle avait combattue des hydres, chevaucher des requins aux abords de l’île de Paros, avait tenue tête à des rhinoféroces. Et plus encore, elle avait échappée toute sa vie à la mort. Ce n’était pas ici qu’elle viendrait la trouver, ce n’était pas ici qu’elle trouverait sa fin. Si le jugement d’Atlantis n’avait réussi à l’ensevelir, les navires fantômes de Koressia n’arriverait pas à bout de la jeune femme qu’elle était devenue. Quelque chose attira malgré tout l’attention de l’Okeanos. Un silence beaucoup trop pesant s’était étendu dans l’allée, comme une nuée de poudre. Elle s’arrête et pose sa main sur son fouet. Le palpitant ralentit, la respiration se fait plus douce, plus silencieuse. « Je ne ferai pas ça si j’étais vous. » dit-elle dans un souffle. Une silhouette lève sa main, et le lasso vient enserrer son poignet. Elle tire un coup sec pour faire venir l’élémentaire face à elle. Masqué, couvert d’une cape aussi noire que la nuit, elle ne peut savoir s’il s’agit d’un homme ou d’une femme. Son pied se loge dans son abdomen, le repoussant alors qu’elle venait de l’attirer jusqu’à elle. Il pousse un léger grognement, avant qu’elle ne défasse son emprise. Ses yeux analysent la situation. Ils sont sept. Dans une allée exiguë. Elle a le réflexe de lever sa main pour manipuler l’eau, mais sa gourde est restée sur le navire. Elle pourrait manipuler l’eau dans l’un d’eux, mais elle serait obligée de se concentrer entièrement sur lui. La laissant alors à la merci des six autres. Elle ne pouvait pas courir le risque. Une boule de feu apparaît dans les airs, fonçant dans sa direction. Elle l’évite de justesse, et lance son fouet pour mettre à terre l’assaillant. Lâchant son fouet, elle agrippe le pommeau de son épée, venant l’enfoncer dans le corps de l’élémentaire du feu. Les os craquent sous la force de la lame. « Je vous avais prévenu. » dit-elle alors qu’elle envoie son épée dans le masque d’un autre de ses assaillants. Elle soupire, légèrement haletante. Un rire éclate dans l’obscurité. « Vous en voulez plus ? » La guerrière observe l’obscurité, cherchant les silhouettes. Elle entend des murmures, puis le craquement des os. Son sourcil se relève, alors que doucement, elle tourne le regard vers sa première victime. Le corps se révulse, se courbe. Puis se relève dans un râle sorti des Enfers. Hadès était à sa porte, et il venait de relever les morts. Le palpitant accélère. Elle n’était pas préparée à ça. Stupéfaite, l’Amazone cherche son épée. Mais elle est bien trop loin. Le fouet lui, se trouve à quelques mètres au sol. Elle entend un second râle, et comprend qu’un autre suppôt du Tartare vient de se relever. Le rire se fait plus fort, alors qu’un éclair enflammé l’envoie valser contre la coque d’un vieux navire. La douleur se fait fulgurante, et elle ne peut empêcher un cri de s’échapper de ses lèvres. La sorcellerie.. Elle n’en avait entendu que des rumeurs, des soupirs. Elle n’aurait jamais pensé qu’elle existait véritablement, et qu’elle en ferait les frais. Elle tente de se relever, mais un nouvel éclair vient la foudroyer de plein fouet. La terreur s’empare d’elle, puis, ses yeux se ferment, et elle se laisse emporter par les abysses.

Un sceau d’eau est balancé sur son visage, la sortant de sa torpeur. Elle n’est plus dans l’allée des embrumes, ou en tout cas, elle n’est plus là où elle se trouvait autrefois. Assise sur une chaise, les mains liées. Plongée dans la pénombre, seulement éclairée par les flammes de bougies. Elle tente d’analyser les lieux, de trouver une porte de sortie. En vain. Elle ne sait pas non plus depuis combien de temps elle se trouve ici. Ses yeux s’habituent à l’obscurité. « Tu es certain que c’est elle ? » murmure une voix masculine. L’autre masqué opine. Elle s’était faite avoir comme une imbécile, une incapable. Où était passée la grande amazone ? La princesse au trident ? Où était passée la princesse à la réputation d’insoumise ? Alekto saurait qu’elle était en danger, Alekto viendrait jusqu’à elle. Aello, son faucon avait dû la suivre aussi. Son fouet, son épée.. si ces sorciers ne s’étaient pas emparés de ses biens, quelqu’un finirait par les trouver. Quelqu’un finirait par venir la sauver. Elle secoue la tête légèrement. Elle n’avait jamais été une demoiselle en détresse, et ne voulait pas l’être maintenant. « Six gardes sont arrivés et protègent l’entrée. L’Héritière devrait bientôt arriver. » L’entrée.. elle était donc dans un lieu clos. Ou dans un lieu qui n’était pas forcément caché. Six gardes. Sept assaillants. Si ceux qu’elle avait tuée était encore en « vie ». Cela faisait donc treize personnes à abattre. Elle inspire doucement. Et.. l’Héritière ? Elle n’avait jamais entendu ce titre jusqu’à aujourd’hui. Pour ce qu’elle en savait l’Héritière pouvait tout aussi bien être une misthios, qu’une vendeuse de choux. Elle baisse la tête, puis, se met à rire. Doucement d’abord, avant d’emplir la salle d’un rire puissant et cristallin. « Je vais tous vous tuer. » rajoute-t-elle. La main forte de l’homme en face d’elle, vient frapper son visage. Pas le visage, pense-t-elle alors. Elle crache du sang sur le sol, avant de relever les yeux vers l’assaillant. « C’est tout ce que tu as ? Tu frappes comme une hétaïre. » Il se met à rire. « Est-ce que tu as déjà senti tes os fondre, ta chaire pourrir ? Non n’est-ce pas.. » Il vient poser son doigt sur la cuisse de l’amazone. « Je pourrai changer tes jambes en racine, faire de ton visage un buisson de rose, faire de.. » Elle le coupe. « Viens en aux faits. On ne vous a jamais apprit qu’il fallait aller à l’essentiel ? Parler, parler.. agissez pour l’amour de Zeus. » Il lève une nouvelle fois sa main, mais quelqu’un frappe à la porte. « C’est elle. » L’autre serre son poing, puis soupire. D’un mouvement de la tête, il autorise son compagnon à ouvrir la porte. Elle entre, démarche féline. Les yeux de Meg vont de bas en haut. Elle observe ses sandales, l’odeur de sel qui se dégage d’elle, avant de poser enfin ses yeux sur son visage.
« .. Despina ? »